Skip to main content

Le sikhisme, une religion monothéiste

REPORTAGE par Pascal Huot, ethnologue

          JUIN 2023

Le Gurdwara Guru Nanak Darbar se trouve dans l’arrondissement LaSalle à Montréal.

PHOTO : PASCAL HUOT

Avec les trois grandes religions abrahamiques (judaïsme, christianisme et islam), le sikhisme occupe une part importante dans la composition religieuse de la population au Canada.

Pourtant, sur la place publique, l’on retient surtout les questions relatives au port de symboles religieux, avec le turban et la polémique entourant le kirpan, ce poignard porté par les sikhs pour défendre leur foi. Cette arme symbolique s’est retrouvée devant les tribunaux supérieurs pour l’interdire dans certains contextes et lieux publics, notamment en milieu scolaire. Mais au-delà des articles à sensation et de quelques figures connues comme Jagmeet Singh, le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) fédéral, connaissons-nous bien cette confession d’origine indienne ?

Naissance d’une grande religion

Le sikhisme est l’une des quatre grandes religions de l’Inde avec l’hindouisme, le bouddhisme et le jaïnisme. La naissance de cette religion remonte au 15e siècle. Ses bases reposent sur les enseignements de Guru Nanak (1469-1539), maître spirituel.

Nanak est né au sein d’une famille hindoue, dans le village de Talwandi, aujourd’hui Nankana Sahib, près de Lahore, dans l’actuel Pakistan. Âgé de 28 ans, alors qu’il se baigne dans la rivière, il se sent emporté par le ciel. Il revient auprès des siens et leur annonce qu’il a vécu une expérience mystique de fusion avec l’essence de toute chose et qu’il a été choisi par Dieu pour devenir un guru, c’est-à-dire un maître spirituel qui mène de l’obscurité (gu) à la lumière (ru).

Mystique nomade, il prêche la dévotion aimante à un Dieu unique autant aux hindous qu’aux musulmans. Il ne souhaite pas s’opposer à l’islam ni à l’hindouisme, non plus que sa propre philosophie religieuse remplace ces religions. Au bout de 20 ans d’errance prédicatrice, il s’installe dans une ferme où il fonde un village appelé Kartarpur, signifiant « ville du Créateur » en punjabi. Avec sa famille et les disciples qui l’ont suivi, il forme la première communauté sikhe.

À sa mort, il nomme un nouveau guru qui va poursuivre son enseignement. Neuf autres maîtres terrestres se succèdent ainsi pour créer et développer le sikhisme actuel. Guru Gobind Singh (1666-1708), dixième guru, déclare avant son trépas qu’après lui, le livre contenant des poèmes et des chants de louange ainsi que des textes de saints hindous et musulmans, écrits, rédigés, codifiés et fixés par les dix guides antérieurs, devait être maintenant considéré comme le guru éternel, soit le Guru Granth Sahib. Ce onzième et ultime guru de 1430 pages est traité avec un grand respect. Conservé sous un dais, sur un trône spécial, il est recouvert durant la nuit d’une étoffe protectrice. Son étude permet aux fidèles de se rapprocher de Dieu.

Le Khanda est le symbole du sikhisme. Il est composé d’un glaive, d’un anneau et de deux sabres recourbés, représentant la force divine, la vérité, la justice et la croyance en un Dieu unique.

PHOTO : PASCAL HUOT

Le gurdwara

Accordant une grande importance à la vie en communauté, traitant tout le monde, hommes (Singh, signifiant lion) et femmes (Kaur, signifiant princesse), sur un pied d’égalité, les sikhs se réunissent dans un lieu de culte nommé gurdwara, mot qui signifie « la porte du guru ». Comme il n’existe pas de prêtre dans le sikhisme, lors des dévotions en groupe, les écritures saintes sont généralement lues par un officiel qui s’occupe du temple et joue le rôle de directeur du culte. Lieu d’enseignement spirituel, celui-ci est ouvert à tous et offre un refuge pour toute personne qui en fait la demande.

À l’intérieur du gurdwara, les fidèles se couvrent la tête en tout temps, retirent leurs chaussures, se lavent les mains et les pieds et s’assoient à même le sol sur un tapis en signe de respect. Après le service religieux, les membres du sangat (communauté) se déplacent à la cuisine communautaire, le langar, pour y partager un repas.

Jeunes sikhs.

PHOTO : PXFUEL.COM

Des règles strictes doivent être respectées pour parfaire son propre karma et obéir à Dieu: chanter des hymnes religieux, méditer, renoncer aux vices et faire abstinence de toute consommation de viande, alcool, drogue et tabac. Le vol, les jeux de hasard et la vénération d’idoles sont aussi proscrits. Le croyant doit également surmonter son égoïsme, être fidèle dans le cadre du mariage, toujours être honnête, apporter son aide à la communauté et secourir les pauvres. L’application de ces règles permet d’aspirer à rompre le cycle des réincarnations et de connaître l’illumination pour ne faire qu’un avec Dieu et atteindre l’état de nirvana.

Les cinq K

Pour la religion sikhe, les observances personnelles et les dévotions sont les aspects les plus importants. Le sikh doit arborer les cinq signes distinctifs extérieurs, connus comme les cinq K. Kesh : ne pas se couper les cheveux ni raser sa barbe, signifiant qu’il accepte la volonté de Dieu. Kangha : un peigne pour garder les cheveux bien coiffés sous son turban, symbolisant la propreté. Kirpan : porter toujours sur soi un poignard recourbé pour exprimer leur force de résistance contre le mal. Kara : un bracelet de fer ou d’acier, symbole de leur fidélité à Dieu. Et Kaccha : revêtir un caleçon attaché par un lacet, symbole de chasteté.

Philosophie d’ouverture à l’autre, prônant l’égalité des sexes et le refus des castes, le sikhisme rejette l’idée qu’une doctrine quelconque détienne la vérité absolue. Il considère ainsi que toutes les religions peuvent mener vers Dieu.

Fondée en 1892 par le bienheureux Frédéric Janssoone, o.f.m.

Magazine d’information religieuse et de vie spirituelle, publié 10 fois l’an, en association avec la mission du Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap.

  • Abonnement
    (819) 374-2441 poste 173

  • Rédaction
    (819) 374-2441 poste 170