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Les enfants que je n’ai pas eus

PERLES DE VIE par Céline Tessier

          MAI 2023

PHOTO : ISTOCKPHOTO.COM/PIKSEL

Jeunes mariés, nous avons appris très tôt que, pour des raisons médicales, nous ne serions pas parents, du moins biologiquement. Ce fut pour notre couple une immense épreuve. Et, pour ainsi dire, insurmontable puisque notre union ne put résister à cet écueil.

Les premières années représentèrent pour la femme que je suis un véritable échec. La maternité étant une option de premier choix, je me sentais vraiment incomplète et d’une tristesse sans fin. Je me rappelle encore aujourd’hui traverser une rue ou un trottoir lorsque je voyais une maman avec son enfant pour ne pas voir ce petit être qui me manquait terriblement. Mais comme le temps est souvent le plus grand des guérisseurs, cette peine fut comblée par mon engagement à accompagner les personnes malades et en phase terminale dans une maison de soins palliatifs et par la suite, en centre hospitalier. Tout en travaillant, la gérontologie ainsi que la psychologie m’intéressaient et ayant une grande liberté, je décidai d’entreprendre des études afin de combler ce vide abyssal qui m’habitait. J’avais déjà un désir et même une propension vers les personnes âgées vulnérables, atteintes de cancer ou d’autres pathologies dégénératives et au dernier versant de leur vie. Leur humilité, leur résilience, leur courage, tout cela me ramenait à relativiser ma peine et à être moins égocentrique.

Écoute, respect, intégrité

Plus de 30 ans à accompagner des êtres humains face à leur finalité, c’est une grâce que je n’aurais jamais pu imaginer. Des centaines de personnes ont fait partie de ma vie, quelques jours, une semaine, un mois et parfois même près d’une année entière. Nous avons échangé, ri et pleuré ensemble. Ce fut une expérience des plus enrichissantes. Lorsque l’on ne peut plus guérir, on peut écouter, respecter l’individu dans son intégrité, et le meilleur que l’on puisse lui transmettre est le fait qu’il fut utile dans sa vie, peu importe que ce soit dans une famille, dans un travail ou dans un accomplissement. Chaque petit geste de bienveillance revêt, pour l’être en fin de vie, une douceur qui apaise sa douleur physique ou morale.

Merci de m’avoir aimée
et de m’avoir permis de vous aimer

Je réalise aujourd’hui que ma vie a été en quelque sorte tracée vers un destin dont je n’aurais jamais imaginé l’importance dans mon cheminement. Cet accompagnement en soins palliatifs représente encore pour moi une source d’enrichissement et d’humilité. Toutes ces personnes, jeunes ou non, ont marqué ma voie et je les remercie de m’avoir aimée et de m’avoir permis de les aimer. Cette non-maternité m’a fait découvrir en chacun d’eux les enfants que je n’ai pas eus. Sans le savoir, ils ont eu une importance viscérale dans mon accomplissement de femme heureuse et reconnaissante.

Fondée en 1892 par le bienheureux Frédéric Janssoone, o.f.m.

Magazine d’information religieuse et de vie spirituelle, publié 10 fois l’an, en association avec la mission du Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap.

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