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L’heure de la repentance

ÉDITORIAL par Stéphane Gaudet, rédacteur en chef

          Septembre 2022

Sur le fronton du Séminaire Saint-Joseph à Trois-Rivières sont gravés les mots « RELIGION ET PATRIE ». Dans notre hymne national, on chante que le bras du Canada « sait porter l’épée, il sait porter la croix ».

Il n’est jamais bon que l’Église se mette au service d’un projet politique. Église et idéologie ne font pas bon ménage. C’est une des choses que le pape François a rappelées au cours de son « pèlerinage pénitentiel » au Canada, une visite en réponse à l’invitation des Autochtones eux-mêmes et des évêques canadiens qui avait pour thème « Marcher ensemble ».

C’est un fait que les Églises ont participé à la colonisation des Amériques par les Espagnols, les Anglais, les Portugais et les Français. Il n’aurait pu en être autrement tant elles étaient omniprésentes dans la vie des gens et des sociétés de l’époque. Cette colonisation s’est faite avec l’épée dans une main et la croix dans l’autre. Lui-même sud-américain, le pape François s’est montré très sensible au thème du colonialisme et à son impact, passé et actuel, sur les populations autochtones du continent. Les pensionnats autochtones, nés sous le régime colonial anglais puis organisés en système par le gouvernement fédéral et tenus par les Églises canadiennes, avaient pour but avoué l’assimilation des Autochtones à la culture dominante blanche. Animés d’un sentiment de supériorité, « des croyants ont imposé leur propre modèle culturel », a déploré le pape à Edmonton. Les langues et cultures de ces populations à civiliser, de même que leurs croyances païennes, ne valaient rien. Selon le pape, on a confondu « l’Évangile de la réconciliation avec le prosélytisme ». Or, « on ne peut annoncer Dieu d’une façon contraire à Dieu », a-t-il dénoncé.

La visite du pape en sol canadien nous a ouvert les yeux, et ceux du monde entier, sur cette page sombre de notre histoire. L’heure n’était pas à nuancer, à relativiser. Ce n’était pas le moment de défendre l’Église, de rappeler les belles choses qui malgré tout ont pu se faire et se vivre dans ce système funeste. L’heure était à l’écoute des victimes de toutes sortes d’abus, pas seulement sexuels, mais aussi psychologiques, verbaux et spirituels. L’heure était à la repentance.

Si certains espéraient que cette visite papale allait clore le sujet, qu’on passerait ensuite à autre chose et n’en entendrait plus parler, le pape lui-même a plutôt évoqué un début et non une fin. La route sera longue.

Les réactions autochtones à la visite papale ont été mitigées. Pour certaines victimes, rien ne sera jamais suffisant pour réparer les traumatismes intergénérationnels. Néanmoins, la présence du pape, ses gestes et ses excuses répétées ont fait du bien à de nombreuses personnes autochtones et favorisé leur guérison; en cela, mission accomplie. Puissions-nous continuer à marcher ensemble vers la nécessaire réconciliation, dans une relation égalitaire et respectueuse des différences.

Fondée en 1892 par le bienheureux Frédéric Janssoone, o.f.m.

Magazine d’information religieuse et de vie spirituelle, publié 10 fois l’an, en association avec la mission du Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap.

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