Skip to main content

Prendre acte

ÉDITORIAL par Stéphane Gaudet, rédacteur en chef

          Mars 2022

Depuis l’automne, je croise régulièrement dans l’autobus un jeune homme qui arbore sur son blouson un écusson antichrétien: au milieu d’un cercle rouge, la croix, barrée par une diagonale. Je me demande chaque fois que je le vois s’il oserait faire de même avec l’étoile de David des juifs ou le croissant de lune étoilé des musulmans.

Dans La Presse, la chroniqueuse Chantal Guy commence son article du 11 décembre intitulé « Le ressac » en évoquant le refus de son conjoint d’aller acheter pour elle le livre controversé de l’humoriste Guy Nantel :

« T’es donc ben snob. Qu’est-ce qui est le plus gênant ? Acheter le livre de Guy Nantel ou mes serviettes sanitaires ? — Acheter la Bible. J’ai fait ça, une fois, et j’étais plus honteux qu’en achetant un Playboy. »

Il n’y a pas si longtemps, à la télé, à la radio, dans les journaux, on faisait attention de ne pas froisser les chrétiens. Manifestement, ce n’est plus le cas. Nous rapportions dans notre numéro précédent les résultats d’un sondage sur la croyance en Dieu au Canada. Chez les francophones du Québec comme des autres provinces, une majorité se dit désormais non croyante. Il était plus risqué de se mettre à dos une grande partie de son auditoire ou de son lectorat à l’époque où celui­-ci était constitué d’une majorité de chrétiens. Mais aujourd’hui…

Il faut prendre acte que de nos jours, notre foi est moquée, ridiculisée, sinon honnie voire haïe. On a cru que l’hostilité de la génération du baby-boom envers le religieux avait laissé place à l’ignorance et à l’indifférence chez leurs enfants et petits-­enfants. On voit que ce n’est pas tout à fait exact. Les manchettes sur les abus sexuels et les pensionnats autochtones suscitent mépris et rejet de notre foi chez les plus jeunes, qui sont bien souvent sans attaches religieuses. Ce sentiment de répulsion vise en premier lieu le christianisme, mais aussi toutes les religions, mises dans le même panier. Tout le bien fait par les chrétiens au cours des âges et encore aujourd’hui passe sous silence, les scandales et erreurs des Églises occupent toute la place. Les arbres cachent la forêt.

Que faire ? Et faut-il faire quelque chose ? Au-delà de prendre acte de cette réalité, je n’en suis pas sûr. Il ne faut certainement pas se mettre à haïr le monde; aimer notre prochain fait partie de notre plus grand commandement. Jésus et ses disciples n’étaient pas bien reçus partout, ils n’ont pas maudit ce monde pour autant. Il faut aussi résister à la tentation de l’entre-soi : vivre entre chrétiens, se couper du reste de la société, avec une mentalité d’assiégés. Le repli identitaire mène tout droit au sectarisme.

Alors, que faire ? Peut-être, comme Jésus et ses disciples, continuer, malgré le rejet. Et aimer, malgré la haine.

Fondée en 1892 par le bienheureux Frédéric Janssoone, o.f.m.

Magazine d’information religieuse et de vie spirituelle, publié 10 fois l’an, en association avec la mission du Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap.

  • Abonnement
    (819) 374-2441 poste 173

  • Rédaction
    (819) 374-2441 poste 170