La deuxième session du Synode des évêques sur la synodalité s’est déroulée à Rome au mois d’octobre 2024. Nous avons rencontré Mgr Alain Faubert, évêque de Valleyfield depuis septembre 2024. Il était depuis 2016 évêque auxiliaire pour l’archidiocèse de Montréal. Mgr Faubert est né en 1965 et a été ordonné prêtre en 1995. Il a fait partie de la délégation canadienne de 12 membres qui a participé l’automne dernier à l’assemblée synodale.
uel était le climat qui régnait à l’assemblée synodale à l’occasion de la deuxième session ?
Il faut vous dire que j’avais été élu en 2022 avec le statut de substitut lors de l’assemblée annuelle des évêques canadiens. Il y avait quatre évêques élus, deux de la section anglophone et deux pour le secteur francophone. J’étais comme la troisième roue du vélo !
Mgr Poisson, évêque du diocèse de Saint-Jérôme–Mont-Laurier qui avait participé à la première session en 2023, a dû s’absenter en 2024 pour raisons de santé. C’est ainsi que j’ai pris l’avion pour Rome le 29 septembre, quelques jours après ma nomination au poste d’évêque de Valleyfield.
J’ai trouvé à Rome un excellent climat. J’avais quelques appréhensions puisque je faisais partie d’un groupe de 25 à 30 personnes qui rejoignait les délégués ayant participé à la première session en octobre 2023. Nous étions 350 délégués. Il y avait un réel climat d’ouverture. Je sentais que nous y vivions une forme concrète de synodalité. J’utilise ces mots pour dire que durant la session de 2024, nous devions faire en sorte que les souhaits liés à la synodalité puissent atterrir dans des propositions concrètes. Il fallait être capable d’appliquer ces souhaits dans l’exercice des diverses responsabilités en Église.
L’Église est un corps. Nous sommes interdépendants. Nous sommes appelés à vivre la complémentarité et la réciprocité. Il y avait un immense défi qui attendait cette assemblée. Les préoccupations des Églises locales avaient été évoquées dans le document préparatoire. Je me demandais comment la conversation dans l’Esprit qui avait caractérisé la première session pouvait se poursuivre et nous habiter.
Vous étiez comme l’an dernier réunis autour de tables rondes. Comment cette démarche se déroulait-elle ?
Nous étions 12 participants autour d’une table, réunis par groupes linguistiques. Il y avait six tables francophones sur un total de 36 tables. Autour des tables, des participants provenaient de différentes cultures. Le groupe représentait la diversité de l’Église. Je crois que nous nous sommes très bien débrouillés dans une Église de Pentecôte. Il y avait six langues officielles au Synode.
Comment se déroulait cette conversation dans l’Esprit ?
J’ai vécu cette conversation comme une véritable expérience spirituelle. La base de la conversation dans l’Esprit repose sur le fait que nous sommes réunis dans la prière. Toute la démarche synodale est une démarche de prière. Le Synode est vu comme une immense liturgie où la Parole de Dieu, le silence et la méditation ont leur place. Le dénominateur commun de cette longue démarche qui a commencé dans les diocèses est la prière à l’Esprit Saint. C’est lui le guide et l’architecte de l’Église. On dit souvent que l’Église est une barque. L’Esprit est le vent qui souffle dans la voile.
La démarche était très encadrée. Chacun pouvait s’exprimer durant trois minutes. Nous prenions un temps de silence après trois ou quatre interventions. Il y avait ensuite un deuxième tour de table pour permettre de souligner ce qu’on avait retenu lors du premier tour. Un troisième tour permettait de rédiger une synthèse qui était transmise au secrétariat général. La diversité des personnes qui entouraient la table reflétait tous les groupes de baptisés : il y avait des baptisés évêques, des baptisés prêtres, des baptisés laïques et religieux. Il y avait des baptisés qui provenaient des autres Églises chrétiennes. Il y avait aussi des délégués fraternels qui avaient droit de parole sans droit de vote. Je signale qu’on a formé de nouveaux groupes à la mi-session afin de pouvoir diversifier encore davantage la réflexion. Je peux dire que le document final reflète le fruit de notre travail. Le pape l’a considéré comme tel et il ne rédigera pas d’exhortation postsynodale.
Les relations renouvelées par la grâce de l’hospitalité offerte
aux petits, selon l’enseignement de Jésus, sont le signe le plus
éloquent de l’action de l’Esprit Saint dans la communauté des disciples.
- Extrait du document final, octobre 2024
La lecture du document final donne beaucoup de place à la conversion des relations. Expliquez-nous le sens de cette conversion.
Amen ! Amen ! La plupart des chapitres du texte final mettent l’accent sur cette réalité. La première conversion est d’abord l’ouverture à l’autre. Une intervention qui m’a beaucoup touché soulignait que nous portons tous une « incomplétude ». Par nature, chaque personne est incomplète. Nous devons reconnaître notre fragilité. Le besoin de convertir nos relations n’est pas une option. Je n’ai pas dans ma fonction épiscopale tous les charismes et je ne possède pas toute la vérité. Je ne peux pas exercer toutes les responsabilités. Je dois compter sur des baptisés qui exercent la complémentarité. L’interdépendance est là. Elle se manifeste à tous les niveaux du processus de discernement jusqu’à la réalisation.
Vous êtes maintenant un évêque à la tête d’un diocèse. Comment la synodalité va-t-elle s’exercer ?
Je me rends compte du défi que cela représente d’être le capitaine d’un bateau où il y a surtout des marins. Je désire entendre le plus de paroles possibles. Je veux que le plus grand nombre de personnes participe au discernement. La synodalité veut dire être ensemble pour le témoignage et le service du Règne de Dieu au cœur du monde. Nous avons besoin de marcher ensemble pour réaliser la mission. Il ne s’agit pas seulement de s’écouter entre nous. Il faut aussi écouter ceux et celles qui ne font pas partie de l’aventure ecclésiale. La synodalité est une ouverture à tous. La création a quelque chose à nous dire à travers les cris qu’elle lance.
La délégation canadienne au Synode a été reçue par l'ambassadrice canadienne au Saint-Siège, madame Joyce Napier, au centre de la photo.
L’Église qui se reçoit de Dieu s’exprime d’abord par la fraternité. C’est une Église inclusive. Comment donner plus de place aux paroles qui nous décoiffent ? L’évangélisation, comme le soulignait le pape Paul VI, commence par cette présence solidaire. Dieu parle par les cris du monde.
Le pape, durant l’été 2024, a semblé fermer la porte à l’établissement du diaconat des femmes baptisées. La question est revenue au Synode. Qu’est-ce que cela veut dire ?
Je pense que cette question a besoin d’une maturation adéquate. J’insiste sur le mot adéquat. Il y a eu au Synode une dizaine de questions qui ont été soumises à des groupes de travail à qui le pape a demandé un approfondissement. Cette démarche se poursuit à l’intérieur du processus synodal. Il faut s’assurer que les choses avancent et mûrissent correctement. Il y a cependant un risque de le laisser mûrir indéfiniment. Il faut qu’une décision soit prise. Nous attendons le résultat de ces groupes de travail au mois de juin 2025. La question du diaconat féminin a suscité des insatisfactions au sein de l’assemblée. Cette question n’est pas fermée. Une autre question se pose. Comment peut-on gérer dans l’Église les questions du pouvoir et des prises de décision ? Comment favoriser la participation dans le gouvernement et l’animation de la communauté ? Il y a des questions à régler comme celui du rapport hommes-femmes avant de dire oui ou non au diaconat féminin.
Le document final insiste: la réforme synodale doit d’abord se dérouler dans les paroisses. Qu’est-ce que ça signifie ?
La paroisse est le lieu privilégié où doit se conjuguer la synodalité. Il faut poser cette question : est-ce que les instances actuelles jouent bien leur rôle ? Mon attention va se porter sur le fait de faire comprendre aux paroissiens que la synodalité leur appartient. Je pense à l’assemblée de paroisse, qui se réunit une fois par année pour élire les marguilliers. Est-il possible de convoquer les paroissiens en d’autres occasions ? Le projet de la paroisse nous concerne tous. Il faut inviter les gens : venez, prions ensemble et parlons de notre communauté. La synodalité se joue au ras des pâquerettes. Qu’est-ce que la paroisse peut faire dans le quartier ? L’Église ne va pas changer par décret ni en lisant des documents. Il faut se rendre compte que la synodalité goûte bon. La participation est requise. On dit souvent que seul, ça va plus vite, mais qu’ensemble, on va plus loin.
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