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À 80 ans, elle persiste... et signe !

PAULINE JACOB, féministe catholique

Par Yves Casgrain

Pauline Jacob, féministe catholique, en entrevue pour La Revue Notre-Dame-du-Cap

Photo: Yves Casgrain

Le combat des féministes catholiques est porté par des femmes croyantes et engagées. Souvent, elles entrent dans cette lutte au fil de leurs engagements au sein de l’Église. C’est le cas de Pauline Jacob. Cette mère de quatre enfants et grand-mère de neuf petits-enfants a accepté de raconter son parcours de militante féministe au sein de cette institution qu’elle aime, malgré tout.

P

auline Jacob est née en 1945 dans une famille catholique. Jeune, elle chemine auprès des Guides. « J’ai été très influencée par le mouvement scout. J’en ai été membre de 7 à 20 ans. Cela m’a nourrie. Mon goût pour l’animation, mon désir d’être proche des gens, surtout des adolescents, me viennent de là. »

Après ses études à l'école normale en 1965, Pauline Jacob pensait se consacrer uniquement à l'enseignement. « Durant mes études, j'ai travaillé durant les mois d'été avec les Sœurs du Bon-Pasteur, à Pierrefonds, où elles avaient ouvert un centre pour les jeunes en difficulté qui s'inspirait de Boscoville. À la fin de mes études, elles m'ont proposé d'y travailler. J'ai enseigné à mi-temps en plus d'être affectée comme éducatrice dans un groupe d'adolescents. »

Au début des années 70, elle décide de parfaire ses connaissances en psychoéducation. C'est lors de ses études qu'elle rencontre celui qui allait devenir son mari. « J'ai décidé de compléter mes stages à Boscoville. C'était un milieu très dynamique. J'y ai travaillé quatre ou cinq ans. J'ai quitté mon emploi après avoir donné naissance à mon premier enfant. »

« Je ne peux pas »

Elle et sa famille fréquentent alors la paroisse Notre-Dame-d'Anjou. « On m'a proposé de faire un peu de pastorale. J'ai commencé par une journée/semaine. » Elle met sur pied des messes familiales dans le sous-sol de l'église. « Des jeunes me demandaient pourquoi je ne pouvais pas les célébrer. Je leur disais simplement : "Je ne peux pas, car je ne suis pas un homme." À l'époque, la question de l'ordination des femmes n'était pas si présente. Nous nous étions tellement fait dire que cela n'était pas possible... »

Après quelques années, elle décide de s'engager plus à fond dans la pastorale. Pour ce faire, elle entreprend des études à la Faculté de théologie de l'Université de Montréal. Vers la fin des années 80, elle commence sa maîtrise. C'est lors de ses études qu'elle a l'occasion d'approfondir la question des femmes dans l'Église. « À l'université, tu as l'occasion de discuter de ces choses. Je ne savais pas que des femmes discutaient de la possibilité pour elles de devenir prêtres. »


« J'ai remarqué que les femmes que j'ai interviewées dans le cadre de mon doctorat auraient pu être ordonnées prêtres si elles avaient été des hommes »


Durant cette période, elle est invitée à se joindre au mouvement Femmes et ministères. Fondée au début des années 80, cette organisation regroupait des femmes qui travaillaient pour l'Église en pastorale ou dans un emploi administratif ainsi que des théologiennes. Aujourd'hui dissout, un de ses objectifs était de « prendre position sur les questions d'actualité relatives à la responsabilité et à la situation de la femme dans la mission de l'Église et à l'accès des femmes à tous les ministères ordonnés ».

« Pour moi, c'était un lieu où l'on pouvait poser ces questions, que je n'osais presque pas me poser, librement. C'était vraiment un lieu extraordinaire. »

Une question de genre

Pauline Jacob décide de réaliser un doctorat, qu'elle termine en 2006 à l'âge de 60 ans. Sa thèse étudie le discernement des femmes québécoises et catholiques qui croient être appelées par Dieu à devenir prêtres ou diacres. À cette fin, elle récolte le témoignage de 15 femmes âgées de 32 à 69 ans provenant de six diocèses du Québec.

« J'ai remarqué que les femmes que j'ai interviewées dans le cadre de mon doctorat auraient pu être ordonnées prêtres si elles avaient été des hommes. C'est juste une question de genre ! »

Pour arriver à cette conclusion, Pauline Jacob a analysé le parcours de ces femmes de la même manière que le parcours des candidats à la prêtrise l'est par l'Église. Pour l'aider dans son discernement, elle a constitué un groupe témoin de 73 personnes composé des membres des communautés chrétiennes de ces 15 femmes, des collègues de travail, des amies et amis.

Accueillir et écouter

Encore aujourd'hui, Pauline Jacob s'insurge devant l'accueil réservé aux femmes qui se sentent appelées par le Seigneur. « Aux yeux de l'Église, cet appel n'est qu'une inspiration quelconque. Non ! Non ! Sur les plans chrétien et évangélique, je trouve cela épouvantable ! Il faudrait au moins les accueillir, les écouter. »

Des années après la publication de son doctorat, qui a été édité, des femmes qui ont participé à son étude lui confient la persistance de cet appel vocationnel. « Ces femmes désirent toujours être ordonnées. C'est toujours là ! », lance-t-elle.

Cette combattante dans l'âme espère toujours que l'Église entende le cri de ces femmes qui veulent pleinement servir le Christ.

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