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Sainte-Famille, trésor de l’île d’Orléans

Par Pascal Huot

Église de la Sainte-Famille de l'île d'Orléans

Photo: PASCAL HUOT

L’église de la Sainte-Famille à l’île d’Orléans se dresse comme un témoin rare et précieux de l’époque du Régime français. Classé « incontournable » par l’Inventaire des lieux de culte du Québec, ce joyau qui semble presque oublié du grand public recèle une richesse patrimoniale inestimable.

L

a municipalité de Sainte-Famille s’étend sur la côte nord de l’île, offrant une vue imprenable sur Château-Richer et Sainte-Anne-de-Beaupré. Membre de l’Association des plus beaux villages du Québec, ce lieu enchanteur possède une riche histoire. Première paroisse de l’île, fondée en 1661 sous le nom de Paroisse de l’île (jusqu’en 1679), Sainte-Famille a vu la construction de sa première église en pierre de 26 mètres dès 1669. Cet édifice se dressait légèrement au nord de l’emplacement de l’actuel bâtiment.

La dévotion de François de Laval

Canoniquement érigée en 1684, la paroisse adopte son nouveau nom en l’honneur de la Sainte Famille de Nazareth, inspirée par la profonde dévotion de Mgr François de Laval. La dégradation avancée de la première église pousse les paroissiens à l’évidence : un nouveau lieu de culte doit voir le jour.

En 1743, les travaux commencent pour ériger cette église majestueuse, entièrement faite de pierre et conçue selon un plan en croix latine. Orientée est-ouest, avec le chœur tourné vers le soleil levant, elle symbolise le Christ ressuscité. Après quatre années de travail, en 1747, la construction se termine. Cet édifice exceptionnel se distingue par son impressionnante monumentalité, avec sa façade imposante flanquée de trois clochers. En 1807, les deux tours hors-d’œuvre à l’avant sont surélevées de trois mètres et ornées de clochers fonctionnels, ajoutant à la grandeur au bâtiment.

La décoration intérieure se distingue par deux influences ornementales dominantes de la première moitié du 19e siècle. Deux chantiers successifs sont respectivement réalisés, pour la première phase par le sculpteur Louis-Basile David, qui en 1812 s’occupe d’abord de la fausse voûte de caisson en l’ornant de losanges et de motifs floraux. Faisant fi de ce style architectural, l’architecte Thomas Baillairgé réalise entre 1821 et 1825 les retables du chœur et des chapelles latérales selon le style néoclassique.

L’occupation anglaise

L’église constitue un des rares témoignages encore debout de l’architecture religieuse du Régime français. Actrice de l’histoire qui s’est écrite sur son territoire, elle sera notamment, pendant l’occupation britannique en 1759-1760, lourdement endommagée. Les soldats anglais l’envahissent et retirent la cloche pour empêcher les paroissiens de sonner l’alarme. Après le siège, on restaure le bâtiment en urgence en plus d’acheter une nouvelle cloche.

Après avoir survécu aux assauts de l’occupation, l’église subit les assauts de Dame Nature. La foudre la frappe de plein fouet en 1823 et le clocher central est détruit complètement. Il faudra attendre 20 ans avant que celui-ci soit reconstruit, en 1843, sous les plans de Thomas Baillairgé. D’autre part, la façade avec ses cinq niches, qui autrefois abritaient les statues de la Sainte Famille, est maintenant vide, car celles-ci ont succombé au passage du temps et aux intempéries. Afin de retrouver leur place à l’extérieur, ces statues devront faire l’objet d’une restauration future.

L’église se voit reconnaître son importance incontestable en 1980. En effet, elle est classée immeuble patrimonial, ce qui marque une étape cruciale dans la préservation de son héritage.

Une réplique miniature

Une promenade dans le cimetière paroissial adjacent révèle une curiosité des plus fascinantes : une réplique miniature en bois de l’église actuelle, servant de charnier. Cette originalité fut adoptée lors d’une assemblée des marguilliers le 5 novembre 1933. Le contrat de construction fut confié à Jean-Baptiste Prémont, entrepreneur de Québec et ancien paroissien. L’attention portée à cette petite réplique ajoute une touche pittoresque et unique à ce lieu de recueillement.

Le cœur battant de ce village se distingue par l’inestimable valeur de son ensemble institutionnel. En somme, l’église de la Sainte-Famille n’est pas seulement un édifice religieux, mais un véritable livre d’histoire ouvert sur des siècles de patrimoine et de résilience. Son architecture, ses anecdotes fascinantes et l’attachement de la communauté locale en font un incontournable pour quiconque souhaite plonger dans le passé captivant de l’île d’Orléans.

Huile sur toile de Claude François, dit Frère Luc, de 1670 représentant La Sainte-Famille. Cette grande toile, rare œuvre authentifiée de cet artiste récollet, a été réalisée pendant son séjour de 15 mois en Nouvelle-France, en 1670-1671.

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