En 1897, dans son Manuel du pèlerin au Cap-de-la-Madeleine, l’abbé J.-E. Panneton, de concert avec le curé Duguay, identifie ceux à considérer comme les « agents providentiels », les « pieux ouvriers que Marie utilise dans la formation et l’affermissement de son sanctuaire du Cap ».
l mentionne d’abord le curé Paul Vachon qui a établi la confrérie du rosaire en 1694, puis, pour ses premières années, le curé Luc Desilets, le Père Frédéric, l’évêque Mgr Laflèche, l’abbé Duguay, et même le pape Léon XIII à cause de son encyclique sur le Rosaire de 1888.
À cette liste, il faudrait bien ajouter Pierre Lacroix, sans qui personne n’aurait été témoin du mouvement des yeux de la statue de Marie dans le Petit Sanctuaire le 22 juin 1888. Parce qu’après avoir tant espéré toute cette journée-là que Marie se manifeste par un signe visible, les trois responsables de la fête, le curé Désilets, le Père Frédéric et le vicaire Duguay, s’en étaient retournés au presbytère, quasiment bredouilles. Le souper terminé, on frappe à la porte. C’est Pierre Lacroix qui entraîne le curé Desilets et le Père Frédéric dans le Petit Sanctuaire et c’est là que survient le prodige, l’un des deux événements considérés comme fondateurs du Sanctuaire.
UN « MALADE TOUT PERCLUS »
Qui est-il, ce Pierre Lacroix que les images présentent comme un vieillard depuis 1937, dont la biographie n’a pas été faite et dont la photo a été trouvée plus tard ? Était-il un vieillard ? Non, il avait 49 ans au moment du prodige. De deux mois et demi l’aîné du Père Frédéric.
Pierre Lacroix, fils de François Lefebvre dit Lacroix et de Calixte Vivier, est né le 28 août 1838 au Cap-de-la-Madeleine. Il a été baptisé dans l’actuel Petit Sanctuaire, alors église paroissiale. Il est le quatrième enfant d’une famille de cinq. À l’âge de 31 ans, le 25 janvier 1870, il épouse Philomène Dupont, 23 ans, fille de Charles Dupont et de Julie Roy. Après leur mariage, le couple réside chez les parents de Pierre au Cap avec Louis, frère de Pierre, et Adéline, sœur de Philomène, qui sont les parents de Joseph, 2 ans. Pierre est ingénieur. En 1876, ils achètent un terrain sur la rue Notre-Dame et y construisent leur maison.
Le 22 juin 1888, lorsque Pierre Lacroix va prier devant la statue de Marie, on peut supposer que c’est pour sa propre santé puisqu’il est un « malade tout perclus », selon le vicaire Duguay, ou pour celle de sa famille, alors que la mortalité infantile l’a frappée durement en emportant l’un après l’autre six de leurs huit enfants.
DES DETTES
Un an plus tard, Philomène Dupont décède le 22 juillet 1889. Elle n’a que 43 ans. Outre son mari handicapé, elle laisse dans le deuil ses deux filles, Bertha, 7 ans, et Léda, 3 ans. Ses funérailles ont lieu le lendemain en l’église du Cap (située à l’arrière du Petit Sanctuaire). Elles seront présidées par le Père Frédéric, qui résidait encore au presbytère du Cap.
La semaine suivante, le 29 juillet, Pierre Lacroix est nommé tuteur de ses enfants encore mineurs, comme le veut la loi, chargé d’en prendre soin et d’administrer leurs biens. Le lendemain, le veuf fait procéder à l’inventaire des biens du couple. Outre leur maison, les biens meubles sont estimés à 33,15 $. Leurs dettes sont élevées: 208,62 $, dont 33,65 $ à l’ancien propriétaire de la maison et 20 $ aux docteurs Hétu, Gervais et Panneton, pour des soins médicaux qui ne sont pas précisés. Le 5 août, la maison est vendue au prix de 250 $, ce qui permet de rembourser toutes les dettes.
Aussitôt, le 7 août 1889, les deux enfants sont placés à l’orphelinat de l’Hôpital Saint-Joseph. Leur père sera admis à son tour à l’hospice de cet hôpital le 14 juin 1890 à l’âge de 52 ans. C’est là que le frère du curé Desilets, le notaire Pierre Desilets, se rend le 14 janvier 1895 pour recueillir son témoignage du prodige de 1888. Et c’est là que 10 mois plus tard, le 30 octobre, Pierre Lacroix rendait l’âme à l’âge de 57 ans. Ses funérailles ont lieu le 2 novembre en l’église du Cap. L’inhumation a lieu le même jour au cimetière paroissial, alors situé près de l’église.
Pierre Lacroix peu avant son décès.
DANS LES ANNALES
Son décès n’a pas été signalé dans les Annales, ni dans le journal. Est-ce parce que le prodige des yeux n’avait pas encore été formellement rendu public ? Peut-être, puisqu’il faudra vraisemblablement attendre l’année suivante pour que la nouvelle soit publiée une première fois. Et ce n’est qu’en 1913 que son nom sera mentionné la première fois dans les Annales.
Quelle marque le prodige a-t-il laissée chez Pierre Lacroix ? A-t-il changé le reste de sa vie comme il a changé celle du Père Frédéric, qui en parlait souvent et qui le rapporte dans le premier historique du Sanctuaire en 1897 ? On peut l’imaginer.
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